Peu connu du grand public, Lauric Ngouembé fait pourtant partie des hauts cadres qui font régner depuis quelques années, la pluie et le beau temps au ministère des finances. Des Douanes à l’Autorité de Régulations des Marchés Publics (ARMP) en passant par l’Inspection Générale des finances, puis dans un cabinet ministériel, l’homme a toujours su rebondir grâce au soutien aveugle de Jean-Baptiste Ondaye, en dépit des accusations de corruption, de détournements des deniers publics qui lui collent à la peau.
Membre influent du cabinet noir
Depuis sa nomination dans le gouvernement Collinet Makosso 2, le 24 septembre 2022, le Ministre de l’Économie et des Finances, Jean-Baptiste Ondaye, n’a pas encore formé son cabinet. Bien qu’il ait gardé l’équipe de son prédécesseur Rigobert Andely, Jean-Baptiste Ondaye s’est adjoint les services de 5 personnalités désignées comme « experts » qui lui servent de Shadow cabinet (cabinet de l’ombre) ayant autorité sur tous les dossiers traités par le ministre. Lauric Ngouembé figure en bonne place dans ce cabinet de l’ombre. Il est qualifié par ses détracteurs de « cerveau du ministre » car « c’est lui qui pense tout et le ministre ne fait que suivre et exécuter ses prises de position dans les dossiers sensibles » nous renseigne un cadre du ministère. « Lauric Ngouembé est l’homme de confiance du ministre, il est de tous les dossiers. Il tient le ministre et ce dernier n’arrive pas à se séparer de lui alors qu’il est bien au courant des lourds soupçons de corruption, détournements, tentative d’extorsion de fonds qui pèsent sur son protégé, depuis qu’il était à la Direction des enquêtes douanières jusqu’à son atterrissage à l’ARMP » décrit un autre cadre.
Parcours chaotique dans la haute administration
Pourtant reconnu comme cadre « compétent et bosseur », Lauric Ngouembe, habitué des bureaux climatisés du ministère des finances, n’a jamais tenu longtemps aux postes qu’il a toujours convoités et obtenus des ministres qui le choyait, de Calixte Nganongo à Jean-Baptiste Ondaye en passant par Rigobert Andély. Tenez, en 2018, alors qu’il est Directeur des Enquêtes Douanières, Lauric Ngouembé est désavoué par les travailleurs de la douane qui l’accusent de malversations financières, et, barricadent son bureau. Ces derniers obtiennent son départ et son remplacement par Aaron Kounenguika. Avec le soutien du ministre Calixte Nganongo, Lauric Ngouembe est bombardé Inspecteur Général des Finances. Là aussi, il va s’illustrer par des pratiques loin de toute orthodoxie financière. Lauric Ngouembe est accusé d’être impliqué dans un vaste réseau de « corruption et de détournement de deniers publics » par un ancien Inspecteur des finances Grégoire Dieudonné SAMBA.
Rigobert Andely, successeur de Calixte Nganongo au ministère des finances va vite se séparer de Lauric Ngouembe en 2021, le soupçonnant de malversations financières et de tentatives d’extorsion des fonds auprès d’une société pétrolière chinoise. La même année 2021, Lauric Ngouembe atterri dans le cabinet de Jean Rosaire Ibara ministre du Contrôle de l’État. Ce dernier le nomme directeur de cabinet, avant de s’en séparer un an après, le 15 juin 2022. Comme au ministère des finances, Jean-Rosaire Ibara accuse son directeur de cabinet de malversations financières et d’abus de pouvoir.
En effet, dans une lettre qu’il avait fait signer à son ministre, Lauric Ngouembe avait sollicité sa nomination comme membre du Conseil d’administration de La Banque Postale, ce qui est contraire aux usages et aux textes qui régissent les institutions financières de la CEMAC. Viré du cabinet du Ministre Jean Rosaire IBARRA, Lauric Ngouembe est nommé avec le soutien de Jean-Baptiste Ondaye Président du conseil de surveillance de L’Autorité » de Régulation des Marchés Publics. Le 16 février 2023, Il a été évincé de ce poste lors de la session dudit conseil, pour malversation et abus de pouvoir. « Le successeur de Rigobert Andely se serait payé des émoluments mensuels et des arriérés qu’il cumulait en qualité de président du conseil qui s’élèveraient à 5 millions par moi, tandis que les agents ne recevaient aucun sous », écrit le journal en ligne Brazza Net.
La Centrale de Documentation et d’Informations (ex DGST) a été saisie de l’affaire ARMP. Elle a décidé d’entendre ce 24 février 2023 Lauric Ngouembe. Il devrait s’expliquer sur sa gestion en tant que PCA de l’ARMP et des pouvoirs qu’il s’était arrogé pour gérer seul les finances de l’institution : sorties d’argent non justifiées, salaires impayés alors que les caisses de l’ARMP étaient pleines pour assurer ne fut-ce que 3 mois de salaires en attendant la subvention de l’État. Les hommes du général Obara, ne manqueront pas de refaire le parcours de Lauric Ngouembe dans la haute administration financière, même si ce n’est pas pour la première fois qu’il est entendu par l’ex DGST.
FMI, bailleurs internationaux et gouvernance
Le Congo est revenu dans les bonnes grâces des bailleurs internationaux, mais le pays reste sous surveillance. Alors que le 1er ministre vante dans les médias les mérites de son gouvernement qui a ramené le Congo sur la table du FMI, on peine à croire l’insouciance constatée au sein du ministère des finances pour maintenir cet état de grâce. Le ministre des finances Jean-Baptiste Ondaye a besoin de s’entourer de cadres compétents, bosseurs et irréprochables. Or, son poulain Lauric Ngouembe est trop impliqué dans les scandales financiers dans toutes les administrations où il est passé, en attendant que la justice s’en saisisse.
Landry B. D.