L’obtention d’un passeport estampillé ‘’République du Congo démocratique’’ relève d’un véritable parcours de combattant depuis quelques années, contrairement à ce que prévoient les textes réglementaires de cet État d’environ 100 millions d’habitants. C’est pourtant un droit légitime pour le citoyen congolais. Tracasserie, trafic d’influence, pots-de-vin sont le lot de situations constatées pour la délivrance de ce document officiel obligatoire pour voyager vers un autre pays. Il s’agit d’un document essentiel pour les citoyens congolais dont on reconnaît l’appétence pour les voyages hors du pays. Le passeport congolais est de ce fait devenu l’un des plus chers au monde et son prix est estimé à 200 dollars US, contrairement aux autres pays où, sans contrainte, l’on peut l’obtenir à peu de de frais. Le revenu moyen du congolais n’est pourtant que de un dollar par jour. Comment on est arrive là ?
SEMLEX et ses affidés LOCASEN, PARAGON , IDEMIA au cœur d’un scandale de corruption en RDC ?
L’histoire remonte à quelques années après l’arrivée l'arrivée du président KABILA au pouvoir, plus précisément en 2001, quand il fut approché par Albert Karaziwan, alors patron de la firme belge SEMLEX. Cette société de droits belges était déjà accusée de pratiques obscures dans ce vaste pays de 2,6 millions de km2 de superficie et de près de 100 millions d’habitants. Et pendant 17 ans, Albert Karaziwan a dû bénéficier de ce marché juteux de fabrication des passeports congolais.
Le nouveau président Monsieur Felix Tshisekedi a suscité l’espoir que ces manœuvres sordides autour de ce document officiel puissent enfin s’estomper. Hélas! Rien n’a été fait. La machine reste lancée.
Déjà en 2016, le magazine belge d’investigation, le Medor, signalait que la douane belge avait intercepté un émissaire de la présidence congolaise à l’aéroport de Bruxelles-National. Dans son bagage à main, sieur Engo Nkanda, un associé d’Emmanuel Adrupiako, « le » prétendu financier de Joseph Kabila, convoyait environ 400 000 euros, répartis en coupures de 200 et 500 euros. Dans son téléphone se trouvaient des références au contrat des passeports livrés à la République démocratique du Congo par la firme bruxelloise SEMLEX SA. Ce juteux contrat aurait été signé le 11 juin 2015 pour une une durée de cinq ans.
En 2017 et en 2018, l’agence de presse Reuters, le consortium international de journalistes OCCRP et Médor avait publié des enquêtes éclairant sur l’expansion douteuse de SEMLEX SA sur le continent africain, en rapportant quelques preuves de pots de vin dont seraient bénéficiaires plusieurs hauts dirigeants politiques. On pouvait lire dans la livraison du magazine Medor, du 20 mai 2020, des titres comme « SEMLEX et Tshisekedi : leur confiance réciproque… Une justification de nombreuses plaintes à Bruxelles et Kinshassa contre le sulfureux passeport congolais ».
Pour leur business en République démocratique du Congo, la société SEMLEX et son patron belge Albert Karaziwan restent aujourd’hui dans le viseur du Parquet fédéral, en charge de la criminalité transfrontalière organisée.
Le gouvernement de Felix Tshisekedi voulait dénoncer le contrat avec SEMLEX dès 2020.
La résiliation du contrat avec SEMLEX a été annoncée dès le 19 novembre 2020 par Dominique Migisha, Conseiller spécial en charge du numérique du président Congolais Félix Tshisékédi qui s’exprimait sur Twitter. Faire baisser le coût du passeport et le rendre accessible à tous les congolais était le mobile de cette annonce fracassante qui intervenait finalement au lendemain d’une rupture consommée du contrat entre l’Etat congolais et la société belge SEMLEX qui était jusqu’ici chargée de fournir ces passeports. C’est fut l’accomplissement de l’une des promesses du candidat devenu président Felix Tshisekedi aujourd’hui.
Pourtant, à la surprise générale, d’âpres négociations et manœuvres souterraines auraient été menées au point de rapprocher Albert Karaziwan patron SEMLEX au président Felix Tshisekedi, avec pour conséquence, une grande opération de montage financier avec des sociétés appartenants au même groupe belge SEMLEX, notamment IDEMIA, LOCASEN, PARAGON. L’objectif étant de maintenir les activités de SEMLEX mais de façon masquée.
En clair, SEMLEX c’est LOCASEN par le biais de laquelle est signé un contrat juteux avec PARAGON qui par la suite signera avec IDEMIA. Presque un délit d’initié ou d’association en bande organisée, car en retenant IDEMIA sur la short liste, SEMLEX revient par la grande porte afin de récupérer le marché par la main gauche, à travers sa filiale IDEMIA, tout comme PARAGON.
La promesse d’éditer un passeport à 8 dollars est malheureusement restée vaine, au-delà du fait que ce même consortium a fait une invitation au président Felix Tshisékédi en Turquie.
En effet, le 17 septembre, monsieur Aganze Rafiki twitait: "Félix Tshisekedi est arrivé ce matin à Istanbul pour assister au mariage du fils de l’homme d’affaires belgo-Turc Lokman Sever et il s’en volera par la suite vers les USA pour assister à la 77 ème assemblée générale des Nations-Unies ".
Lors de ce déplacement du président congolais Felix Tshisékédi à Istanbul, une présence aurait attiré l’attention, c’est celle de monsieur Tshilombo Tshintuntu Tshifueba. Ce qui expliquait le retour en surface du dossier de passeports biométriques par la société SEMLEX qui aurait, entre autres spécialités, la biométrie, le développement de systèmes d'identification et la création des documents d'identification sécurisés tels que les passeports et les cartes d'identité.
L'entreprise belge SEMLEX aurait activé son entregent au ministère des affaires étrangères afin de remporter l'appel d'offres auquel elle avait candidaté avec neuf autres sociétés.
De sources bien informées, monsieur Sever Lokman avait ouvert des comptes en Turquie pour Christophe Lutundula Apala, Vice-Premier Ministre, ministre des Affaires étrangères, après avoir rencontré Albert Karaziwan, l'arménien président de la redoutable SEMLEX et sa filiale LOCASEM, après avoir negocié des commissions sur la fabrication des passeports destinés à la RDC.
N’est-ce pas là ruiner ou ternir l’image d’un pays qui ne demande qu’à se faire respecter, alors que même le contrôle des datas lui échappe, puisque passé aux mains de ceux dont le but est de tirer énormément profit de ce dossier devenu sulfureux au détriment des citoyens congolais?
Livrée à elle même, la RDC a en plus donné à SEMLEX, une autre source de revenus en vendant ses datas aux enchères aux belligérants, notamment aux rwandais, ougandais et burundais qui, de plus en plus peuvent de fait s’octroyer à qui mieux -mieux, la nationalité congolaise.
Pour mémoire, dans un courriel au président Joseph Kabila, datant du 16 octobre 2014, le CEO de SEMLEX faisait l’offre de services de production de passeports à la RDC pour un prix variant « entre 20 à 40 dollars » par passeport électronique. Une arnaque simplement, la réalité sur le terrain ayant prouvé le contraire.
Du non-dit, il est connu que sur les 200 dollars du prix du passeport congolais, le gouvernement congolais ne perçoit que 65 dollars . Une société basée en Belgique et une autre aux Émirats arabes unis percevraient les sommes prélevées sur ce passeport coûteux et difficile à obtenir.
De nombreuses sociétés reconnues mondialement pour leur expertise ont pourtant proposé le prix d’un passeport biométrique simple à 8 dollars et la probabilité d’installer en RDC une infrastructure de production et de fabrication locale de ce même document officiel, avec transfert de technologie. Hélas ! Cette proposition a été rejetée par le gouvernement congolais, vue que certains en profiteraient déjà à hauteur de 2,5 millions de dollars, selon certaines sources. Une véritable saignée financière pour l’économie d’un pays à revenus moyens.
C’est dire qu’en réalité le président Félix Tchissekedi n’aura pas réussi à stopper une situation scandaleuse qui ruine l’État congolais. Une affaire de Passeport entachée par un contrat qui lui-même fait l’objet de soupçon de corruption car épinglé par la justice belge et dénoncé par plus de 51 victimes congolaises.
Pour ce « PasseportGate », une plainte contre la société SEMLEX Europe est cours à Bruxelles, où une enquête pénale est organisée simultanément aussi à Kinshasa. Les associations de revendication qui réclament la vérité sont soutenues par la Fédération internationale des droits de l’homme(FIDH), la Ligue belge des droits humains, le 11. 11. 11 et UNIS (un réseau panafricains de lutte contre la corruption).
L’affaire du passeport congolais avec SEMLEX et ses filiales IDEMIA, LOCASEN, PARAGON mérite d’être pris au sérieux et demande juste à rétablir le citoyens congolais dans ses droits afin d’obtenir ce qui lui revient de droit.
Par Jean Alfred Diallo